Cherchant a articuler les acquis de la sociologie du travail avec ceux de la sociologie morale, ce chapitre propose une reflexion sur la facon dont s'articulent travail et sens de la justice aujourd'hui. Au-dela de mutations sociologiques recentes (Etat social actif, responsabilite sociale de l'entreprise), il montre comment la tradition liberale a exclu le travail de la scene normative, autrement dit n'a jamais permis de faire du travail une categorie a part entiere des reflexions sur la justice. Bien qu'importantes, certaines theories de reference (Rawls, Habermas) ont meme accentue ce phenomene. En contrepoint, ce chapitre propose d'identifier des grammmaires de la justice dans le travail. Il conclut en proposant que les institutions du travail soient capables de reconnaitre les travailleurs comme des sujets politiques et ethiques a part entiere, en les dotant des capacites leur permettant de construire des arguments adaptes a leur experience de l'injustice. Tel serait l'enjeu d'une politique de la civilite.